Les dernières parutions critiques sur Marguerite Duras retiennent, presque unanimement, la tonalité dysphorique de son travail : cette dimension est irréfutable mais réductrice. Dans un premier temps, notre mémoire souscrit aux interprétations qui font de la production durassienne une véritable réserve de désespoir. Nous y passons en revue l’ensemble des thèmes qui, a priori, semblent faire signe du côté du pessimisme ; tant dans les “autoromans” que dans les fictions (perte d’identité, inexistence de Dieu, impossibilité de la fusion amoureuse, impouvoir du langage, etc.)

A relire son œuvre, il nous est apparu que Duras ne s’en tenait pas à un simple constat d’échec. L’athymie se trouve en effet contrebalancée par un mouvement dynamique de recherche : quête de soi, relayée par la quête d’une transcendance et la poursuite de l’amour fou. Recherches rendues effectives par un travail extrêmement riche sur la langue, source de jubilation. Finalement, tout concourt au concept durassien par excellence : le « gai désespoir », auquel aboutit notre travail. Ce principe met en évidence une sorte d’absence à soi-même que nous avons qualifiée de « philosophie de la désappropriation ».

Ici, toutes les données pessimistes de l’œuvre se renversent et se transforment en instruments permettant l’accession au bonheur.

Marguerite Duras et la recherche du bonheur - Rodolphe Kobuszewski, Collection lettres  2004

Livre d'occasion état neuf 15€